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Et si le pair-à-pair devenait le modèle et le moteur d’une nouvelle organisation sociale ? – Troisième volet de la réflexion de Michel Bauwens (si vous avez raté le début, c’est par ici).
Source : Blueprint for P2P Society par Michel Bauwens
Traduction Framalang : Fabrice, goofy, jums, Delaforest, mo, avec l’aimable contribution de Maïa Dereva.
Pouvons-nous alors imaginer une nouvelle sorte d’état ? C’est là qu’entre en scène le concept d’État Partenaire ! L’État Partenaire, théorisé par le scientifique et politique italien Cosma Orsi1, est une forme d’état qui permet et renforce la création de valeur sociale par ses citoyens. Il protège l’infrastructure de coopération qui est le pilier de la société.
L’État Partenaire peut exister à n’importe quel niveau territorial comme un ensemble d’institutions qui protège le bien commun et permet aux citoyens de créer de la valeur. Il reproduit sur une échelle territoriale ce que les institutions à but lucratif font à l’échelle d’un projet. Pendant que les associations à but lucratif travaillent pour les commoners en tant que contributeurs et participants à des projets précis, l’État Partenaire travaille pour les citoyens.
Ceci est nécessaire car, tout comme la « main invisible » du marché est un mythe, la main invisible des communs l’est tout autant. Les commoners ont tendance à se sentir concernés par leurs communs, mais non pas par la société dans sa globalité. Cette considération spécifique de la totalité requiert son propre ensemble spécifique d’institutions !
La bonne nouvelle, c’est qu’un tel État Partenaire existe déjà, et nous avons pu le voir en action, au moins sous une forme embryonnaire et locale. Il y a quelques années, j’ai pu visiter la ville française de Brest. Brest n’est pas une belle ville, mais elle se situe dans une région naturelle magnifique. Elle a été bombardée lors de la Seconde guerre mondiale et de nombreux logements sociaux, peu attrayants, ont été construits conduisant à une anomie sociale. Michel Briand, adjoint au maire, ainsi que son équipe d’employés municipaux ont eu une idée brillante : pourquoi ne pas utiliser le virtuel pour améliorer la vie sociale réelle au sein de la ville ?
L’équipe a créé des versions locales de Facebook, YouTube et Flickr, a aidé les associations locales à développer leur présence en ligne, a investi énormément dans la formation et a même construit une vraie bibliothèque où les citoyens pouvaient emprunter du matériel de production. L’un de leur projet a été de redynamiser les vieux « sentiers des douaniers » dans le but d’attirer des foules de randonneurs. Ils ont alors décidé « d’enrichir virtuellement » les chemins de randonnée.
Et c’est ici que l’innovation sociale entre en jeu : le conseil municipal n’a pas effectué cela en se substituant lui-même à l’ensemble des citoyens (à la manière de l’état pourvoyeur), ni en demandant au secteur privé de mener ce projet à bien (privatisation ou partenariat public-privé). Ce qu’il a fait, c’est donner aux équipes locales de citoyens les moyens de créer de la valeur ajoutée.
Cela s’est fait sous différentes formes comme la création de galeries de photos de monuments remarquables, des collections d’histoires orales, et bien d’autres choses. Même « l’enregistrement des chants d’oiseaux » était au programme ! L’État Partenaire c’est cela, à savoir des autorités publiques qui créent le bon environnement et la bonne infrastructure de soutien pour que les citoyens puissent produire, entre pairs, de la valeur dont toute la société bénéficie.
L’État Partenaire stimule une économie locale prospère tout comme des entrepreneurs locaux créent une valeur ajoutée sur le marché et attirent plus de touristes. Michel Briand et son équipe ont travaillé sans relâche « pour le bénéfice des citoyens », améliorant leur capacité à créer de la valeur civique. Évidemment, la connaissance et la culture créées ont constitué des communs dynamiques. Si nous élargissons cela à une échelle nationale voire supra-nationale, nous obtenons un État qui pratique « les biens communs », c’est-à-dire qui promeut les communs et les commoners créateurs de valeur.
Il existe bien sûr d’autres exemples qui méritent d’être mentionnés. La région autrichienne de Linz s’est elle-même déclarée région de biens communs. La ville de Naples a créé la fonction d’« assistant du maire pour les biens communs », et San Francisco a créé un groupe de travail afin de promouvoir l’économie collaborative.
Cependant un danger guette ici, illustré par le programme Big Society au Royaume-Uni qui utilise un langage superficiel similaire d’autonomie et d’action civiques, mais cache une pratique complètement différente, c’est-à-dire qui repose sur une stratégie de continuation de l’affaiblissement de l’État-providence et de ce à quoi il pourvoit. Un État Partenaire ne peut pas se fonder sur la destruction de l’infrastructure publique de coopération.
Cela n’a sûrement pas été l’intention première de Philipp Blond et de sa société orientée vers la société civile dans son livre Red Tory, mais ce fut certainement ce que le gouvernement de David Cameron a mis en pratique avec la Big Society. La production entre pairs d’une valeur commune requiert une richesse civique ainsi que des institutions civiques puissantes ! Autrement dit, le concept d’État partenaire transcende et inclut le meilleur de l’État providence, c’est-à-dire des mécanismes de solidarité sociale, un niveau élevé d’éducation et une vie culturelle dynamique et soutenue par le public.
Ce que les conservateurs britanniques ont fait, c’est d’utiliser la rhétorique de la Big Society pour tenter d’affaiblir davantage les vestiges de la solidarité sociale et de renvoyer les gens à leur propre sort sans aucun soutien. Ce qui ne leur donnait ni pouvoir ni valorisation, mais plutôt l’inverse.
Alors que la production entre pairs apparaîtra aussi et sans aucun doute comme un moteur de résilience en période de crise, une société réellement prospère fondée sur le bien commun nécessite un État partenaire, c’est-à-dire un réseau d’institutions démocratiques d’utilité publique, qui protège le bien commun à l’échelle territoriale.
La production entre pairs existe en relation avec une coalition entrepreneuriale qui crée de la valeur marchande en plus des communs. Cependant, la croissance exponentielle dans la création de valeur utilisateur par des publics productifs, ou produsers comme Axel Bruns les appelle, n’est pas sans créer des problèmes et des contradictions pour l’économie politique actuelle.
En fait, cela crée un énorme problème pour le système capitaliste, mais aussi pour les travailleurs, au sens traditionnel du terme, parce que les marchés sont définis comme une manière d’allouer des ressources rares. De plus, le capitalisme n’est pas seulement un système d’allocation de la rareté mais en réalité un système de conception de cette rareté. Il ne peut accumuler du capital qu’en reproduisant et augmentant constamment les conditions de rareté. Là où il n’y a pas de tension entre l’offre et la demande, il ne peut y avoir de marché ni accumulation de capital.
Ce que les producteurs entre pairs font, pour le moment principalement dans la sphère immatérielle de production de connaissances, de logiciel et de conception, c’est créer une abondance d’informations facilement reproductibles et un savoir exploitable, qui ne peuvent pas être directement traduits en valeur marchande, car ils ne sont pas du tout rares, mais au contraire, surabondants. Et cette activité est créée par des professionnels de la connaissance, qui sont maintenant produits si massivement, que leur surnombre les transforme aussi en travailleurs précaires.
D’où un exode accru des capacités de production, sous la forme d’une production de valeur à usage direct, en dehors du système de monétisation existant, qui n’opère qu’en marge de celui-ci. Dans le passé, lorsque de tels exodes ont eu lieu – les esclaves lors de la décadence de l’Empire romain, ou les serfs lors du déclin du Moyen Âge – c’est précisément à ce moment que les conditions étaient réunies pour des transitions sociétales et économiques de grande ampleur mais aussi fondamentales.
En effet, sans une dépendance de base du capital, des marchandises et du travail, il est difficile d’imaginer une continuation du système capitaliste.
Le problème de la création de valeur d’usage que la collaboration sur Internet a permise, c’est qu’elle contourne complètement ce fonctionnement normal. Le fonctionnement normal de notre système économique voudrait qu’un accroissement de la productivité soit d’une manière ou d’une autre récompensé, et que ces récompenses permettent aux consommateurs d’en dégager un revenu et d’acheter des produits.
Mais ce n’est plus le cas. Les utilisateurs de Facebook et de Google créent une valeur commerciale pour leurs plateformes, mais uniquement sous une forme indirecte et ils ne sont pas du tout récompensés pour la création de leur propre valeur. Comme ce qu’ils créent n’est pas marchandisé sur le marché des biens rares, il n’y a pas retour sur investissement pour ces créateurs de valeur. Ce qui veut dire que les médias sociaux mettent en lumière une faille importante de notre système.
L’actuelle soi-disant économie de la connaissance est par conséquent une imposture et une chimère, car l’abondance de biens ne fonctionne pas correctement dans l’économie de marché. Pour le bien de la précarité croissante qui attend les travailleurs du monde, y a-t-il une solution à ce casse-tête ? Pouvons-nous restaurer la boucle de rétroaction qui a été rompue ?
Un exemple de recherche d’une autre gouvernance, par l’Assemblée des communs francophones, image extraite de ce diaporama.
Comme chaque lundi, un coup d’œil dans le rétroviseur pour découvrir les informations que vous avez peut-être ratées la semaine dernière.
La Cour suprême a décidé mardi d’examiner le plaidoyer en faveur de la mise en place d’un mécanisme de réglementation des médias sociaux et de traçage des auteurs de fausses nouvelles, rumeurs et autres contenus répréhensibles comme la pornographie sur des plateformes comme Facebook, WhatsApp, Twitter, YouTube, etc. et a ordonné le transfert à elle-même de toutes les requêtes en instance devant les diverses autres cours.
Johannesburg, la plus grande ville d’Afrique du Sud et la 26ème ville du monde, a fermé son site web, ses services de facturation et ses services électroniques après avoir été victime d’une grave attaque informatique, la deuxième en trois mois […] Un groupe se faisant appeler Shadow Kill Hackers s’est attribué sur Twitter le mérite de l’attaque, affirmant avoir rendu non accessibles des « données financières sensibles de Johannesburg ». Le groupe exige 4 bitcoins, d’une valeur d’environ 32 000$ US, pour rendre les données en toute sécurité.
Les logiciels espions utilisés par les forces de l’ordre suédoises devraient être en mesure d’activer les caméras et les microphones des appareils et obtenir des journaux de discussion chiffrés. En France, ces outils sont autorisés par la loi depuis 2011, mais leur mise en oeuvre est encore toute récente
Jusqu’à hier […] j’étais sceptique à l’égard des affirmations selon lesquelles le traitement subi par Julian était assimilable à de la torture […] et j’étais sceptique aussi envers ceux qui suggéraient qu’il était possiblement soumis à des traitements médicamenteux débilitants. Mais après avoir assisté à des procès, en Ouzbékistan, de plusieurs victimes de tortures extrêmes, et après avoir travaillé avec des survivants de Sierra Leone et d’ailleurs, je peux vous dire qu’hier, j’ai complètement changé d’avis et que Julian présentait exactement les symptômes d’une victime de torture qui arrive en clignant des yeux dans la lumière, notamment en termes de désorientation, de confusion mentale et de réelle lutte pour affirmer un semblant de libre arbitre à travers le brouillard de l’impuissance acquise.
La sécurité des smartphones et tablettes de Samsung, Google et Apple est compromise par les ratés de leurs déverrouillages par empreinte digitale et par reconnaissance faciale.
« Certains pensent que la technologie est magique, que l’intelligence artificielle nous sauvera […] Beaucoup de questions et de préoccupations en matière de protection de la vie privée n’ont pas été réfléchies, et encore moins adressées. » […] « L’idée que tout ce que les élèves recherchent ou tout ce qu’ils écrivent va être surveillé par leur école peut vraiment entraver la croissance et la découverte de soi »
[…] Pour les étudiants noirs et les étudiants handicapés, qui font déjà l’objet d’un nombre disproportionné de mesures disciplinaires sévères, l’introduction de nouveaux types de surveillance peut être particulièrement préjudiciable
L’an prochain, les caméras de vidéoprotection représenteront 70 % de tous les objets connectés exploitant la 5G dans le monde.
Disney+ fonctionnera en fait comme les autres services : le téléchargement sera possible tant que les contenus sont disponibles, mais ils disparaitront ensuite, y compris des terminaux où ils étaient téléchargés.
Les prévisions suggèrent que la forêt pourrait cesser de produire suffisamment de pluie pour subvenir à ses besoins d’ici 2021.
La magnitude de ces résultats nous a étonnés. Ainsi, un agriculteur qui s’appuie sur les abeilles gagne 100 à 200 euros de plus par hectare de colza qu’en utilisant des produits phytosanitaires.
Le Chili est un pays riche. Mais la privatisation de secteurs-clés pérennisé un gouffre d’inégalités qui touche y compris les classes moyennes.
Si la hausse de 30 pesos du prix du ticket de métro a allumé les flammes de la révolte, les Chiliens manifestent contre trente ans de pillage politique, de vol institutionnel et de système capitaliste.les Chiliens n’en peuvent plus et surtout, ils n’ont rien à perdre. Même si l’état d’urgence, la présence de militaires dans les rues et le couvre-feu total nous font penser à la dictature, le peuple chilien n’a plus peur et se rebelle.
Faire des citoyens des alliés de l’Etat et de l’ordre public soulève le risque d’une société de soupçon et de délation. Aux antipodes des principes de solidarité et de fraternité.
Ce déficit proviendrait des mesures « gilets jaunes » et de l’explosion des dépenses de maladie et de retraite, qu’il conviendrait donc de réduire au plus vite. Il s’agit d’un mensonge d’Etat.
Ce discours n’est pas celui de l’apaisement. Il donne des gages à une partie de la population et alimente les discours racistes et xénophobes. Il y a déjà un climat de violence sur l’île très fort, qui se concentre sur les personnes étrangères ou perçues comme telles. […] Vu le contexte social, l’Etat joue avec le feu, c’est extrêmement dangereux.
Avant même la notification officielle de cette sanction, Nicolas B. a subi les brimades de ses supérieurs, détaillent ses avocates :« Congés de Noël refusés, garde imposée le 24 décembre à ce jeune père de famille, retrait de la responsabilité de la formation des jeunes sapeurs pompiers.
La gauche disparaît ? En France peut-être […] Mais un peu partout sur la planète, une gauche des peuples prend le relais des appareils défaillants […] Tous ont deux ennemis : la malgouvernance, le libéralisme sans frein.Les grands esprits du haut de leur implacable lucidité diront ensuite, en ces temps de nationalisme, de démagogie populiste et de réaction identitaire, que les valeurs de liberté et de progrès social n’intéressent plus personne.
Tout a commencé vendredi matin, quand nous avons relayé l’appel à déposer un droit de retrait après l’accident dans les Ardennes, raconte Fabien Villedieu, délégué SUD Rail. Quand on a voulu publier des communiqués ou des articles de presse sur cet événement, un message apparaissait pour nous informer que ces trois comptes étaient limités.
Ce projet de loi exigera des plateformes de communication comptant plus de 100 millions de membres actifs par mois, de donner la possibilité à leurs utilisateurs de transférer leurs données sur un autre réseau. Ces entreprises seraient tenues de tout mettre en œuvre pour faciliter l’interopérabilité.
Le BSI, équivalent allemand de l’Anssi, a testé Firefox, Chrome, IE et Edge. Firefox était le seul navigateur à satisfaire toutes les exigences minimales pour des fonctionnalités de sécurité obligatoires.
La BBC a clairement indiqué que sa décision de créer une version « dark web » de son site était destinée à aider les personnes cherchant des informations indépendantes, en dehors des restrictions imposées par leur gouvernement.
Le navigateur Tor dans son mode par défaut commence avec une fenêtre de contenu arrondie à un multiple de 200px x 100px pour empêcher la détection des dimensions de l’écran. […] Cela a fonctionné jusqu’à ce que les utilisateurs se mettent à redimensionner leurs fenêtres (par exemple en les maximisant ou en les passant en mode plein écran). Tor Browser 9 permet désormais de contrecarrer les dangers liés à ces scénarios.
Retrouvez les revues de web précédentes dans la catégorie Libre Veille du Framablog.
Les articles, commentaires et autres images qui composent ces « Khrys’presso » n’engagent que moi (Khrys).
Dans le cadre de notre campagne « Dégooglisons Internet », nous nous étions engagés à produire, parmi 30 autres services, une alternative aux plateformes de pétition telles que Change ou Avaaz. Cet engagement n’a pas été tenu. Pourquoi ?
Les pétitions sont devenues monnaies courantes sur Internet. On peut en trouver sur à peu près tous les sujets, et elles peuvent être initiées par à peu près n’importe qui.
Évidemment, il pourra nous être opposé que ces pétitions n’ont aucun effet, si ce n’est de (se) donner bonne conscience (« J’ai signé, donc j’ai agi, donc je peux passer à autre chose »). Ou, au contraire, qu’il s’agit d’un outil de mobilisation fort utile permettant de se compter, et de récolter des contacts d’allié⋅es afin de pouvoir s’organiser collectivement. Au fond peu importe, nous faisons le constat que ces outils sont là, et qu’ils sont plébiscités par beaucoup d’internautes.
Le souci, c’est qu’il demeure forcément un flou autour de l’utilisation de nos données (très) personnelles par des plateformes dont le code n’est pas accessible, et qu’on ne peut donc utiliser ou installer pour soi en toute confiance. Ces entreprises peuvent nous jurer, la main sur le cœur, qu’elle ne font pas d’utilisation commerciale de nos données, le fait est qu’elles possèdent des données extrêmement sensibles sur nous (noms, adresses, email, objets de militances, etc.) et que l’histoire nous montre chaque jour à quel point nous devons nous méfier des plateformes (si ce n’est pas le cas, lire notre veille hebdomadaire devrait vous en convaincre rapidement !).
Or, les outils libres de pétitions, qui permettraient de déléguer notre confiance en celles et ceux qui font tourner la plateforme, ne sont pas légion.
On peut citer par exemple l’outil de la Maison Blanche « We The People », dont le code est présent sur Github depuis des années, mais absolument plus maintenu, ce qui pose d’énormes problèmes de sécurité.
Paradoxalement, un des outils les plus solides que nous avions repéré est ce bon vieux SPIP (un logiciel français-oui-monsieur-oui-madame qui a motorisé l’annuaire Framasoft pendant plusieurs années à nos débuts). Cependant, SPIP permettant 1 000 autres choses, son interface de gestion ne nous a pas paru adaptée pour de simples pétitions, et nous avions identifié par ailleurs plusieurs problèmes potentiels dans le cadre d’un usage « multi-organisation ».
Framapétitions et Framamail resteront les deux engagements non tenus de notre campagne « Dégooglisons Internet ».
Autant pour le Framamail, c’était un choix de notre part (trop coûteux à mettre en place et maintenir, et trop de risque de créer une dépendance à Framasoft), autant pour Framapétitions, il ne manquait pas grand-chose pour y parvenir.
En effet, Framapétitions devait être un « sous produit » de Framaforms, développé par Pierre-Yves Gosset (« pyg » pour les intimes), le directeur et délégué général de Framasoft. Comme ce dernier l’indiquait en 2016
[…] en fait Framaforms servira aussi de « bêta test grandeur nature » à un autre projet « Dégooglisons » de Framasoft, à savoir Framapétitions. Si mes choix tiennent la route, alors je pense que je pourrai me relancer un nouveau défi : réaliser Framapétitions en moins de 4 jours ETP (Équivalent Temps Plein) et 0 ligne de code :)
Et alors… ? Et bien « paf-pastèque », comme on dit chez nous ! Il faut croire qu’être directeur de Framasoft ne lui aura pas permis, en trois ans, de trouver une semaine pour s’abstraire du monde et aller coder dans une grotte.
En conséquence, Framapétitions fut sans cesse repoussé au profit d’autres urgences professionnelles ou personnelles.
Début 2018, alors que notre pyg national se demandait encore quand il allait pouvoir trouver le temps de se remettre à Framapétitions, nous avons eu la chance de croiser le chemin d’une autre association : « Résistance à l’Agression Publicitaire » (R.A.P.). Bien qu’ayant un objet de militance a priori éloigné du logiciel libre (la lutte contre le système publicitaire et ses effets négatifs), nous avons vite accroché avec cette association dont les valeurs et les modalités d’actions nous semblent proches des nôtres.
Lors d’une discussion informelle autour de l’intérêt de mettre en place une instance PeerTube au sein de R.A.P. (ce que l’association a fait depuis, bravo à elle !), pyg a évoqué sa frustration concernant Framapétitions. La réaction fut aussi surprenante qu’intéressante : « Ha mais nous on a développé notre propre outil de pétitions, et on l’a mis sous licence libre. »
Les discussions commencèrent alors avec Yann, le développeur de cet outil, nommé Pytition (car le logiciel est développé en langage Python).
Nous avons alors convenu d’un partenariat informel entre nos deux structures : Yann continuerait le développement de Pytition (notamment en y ajoutant une couche permettant de gérer de multiples organisations) et Framasoft participerait à la communication et à l’agrandissement de la communauté de cet outil.
L’intérêt pour R.A.P., c’est que leur projet ne reste pas dans un tiroir et puisse servir à d’autres structures amies, tout en ayant une certaine pérennité.
L’intérêt pour Framasoft, c’est qu’on ne charge pas sur nos épaules le développement et le maintien d’une application de plus (on rame déjà suffisamment avec celles qu’on propose, merci :) ).
L’intérêt commun, c’est de démontrer qu’il est possible, pour une structure qui n’est pas spécialisée dans le numérique, de malgré tout produire et se réapproprier ses propres outils !
Si R.A.P. peut produire son outil de pétitions, pourquoi Greenpeace, par exemple, ne pourrait-elle pas produire un outil libre de crowdfunding ? Ou la Ligue des Droits de l’Homme développer un outil libre de gestion de revue de presse ?
Bonne nouvelle : Yann a bien avancé depuis notre première rencontre. Le logiciel fonctionne bien, puisqu’il est utilisé actuellement en production en version 1.x par R.A.P. Pytition est même très, très proche d’une version 2.0 (il ne manque plus que votre aide : voyez comment en bas de cet article !).
Mais Yann a cependant besoin d’aide pour parachever cette version 2.0. Afin qu’elle puisse être proposée au public et surtout aux associations qui voudraient l’installer et gérer leurs propres pétitions.
Le mieux est sans doute de lui donner la parole !
Bonjour, exercice difficile !
J’ai 31 ans, j’habite Grenoble depuis bientôt 1 an, avant j’étais sur Paris. Je contribue bénévolement au monde associatif depuis quelques années. Bénévole de l’association Résistance a l’Agression Publicitaire depuis 2016 (loi travail), je suis membre du conseil d’administration de l’association depuis 1 an et je viens de m’y faire ré-élire le week-end dernier lors de l’assemblée générale a Lyon pendant les « rencontres intergalactiques ».
Trompettiste sur mes heures perdues (qui sont plus rares que je ne voudrais =)), je profite aussi des montagnes grenobloises pour faire de l’escalade.
Professionnellement je suis développeur de logiciel embarqué dans une boite qui fait du semi conducteur, je bosse principalement sur le kernel Linux, la libc, et je commence à mettre les mains dans la toolchain (gcc, binutils).
Tout ça, comme tu peux le voir est bien loin du développement web, matière ou je suis plutôt novice et en cours d’auto-formation :)
Il faut savoir qu’à R.A.P. (Résistance à l’Agression Publicitaire), on essaie d’être le plus « propre » qu’on peut dans notre démarche militante et les moyens qu’on met en place pour atteindre nos buts.
Par exemple on a une vraie réflexion sur l’usage des réseaux sociaux, sur les aspects vie privée, et publicité, mais aussi sur la culture de l’instantané et l’économie de l’attention.
A partir de là, il faut quand même être pragmatique et quand on veut toucher les gens avec nos articles, nos communiqués et nos pétitions, il est clairement plus efficace d’utiliser les réseaux sociaux hégémoniques.
Un compromis a du être mis en place chez R.A.P., on a donc écrit une charte d’utilisation des réseaux sociaux qu’on essaie de respecter le plus possible.
En l’occurrence, on s’autorise à poster sur les réseaux sociaux propriétaires/publicitaires, avec des liens vers nos sites et vers les autres réseaux alternatifs. Mais on s’interdit de ramener des gens vers les réseaux propriétaires en faisant des liens de notre site vers eux. Donc pas de lien d’antipub.org vers f*cebook, mais on va faire des billets f*cebook avec des liens vers nos articles R.A.P..
Un jour, Khaled (ancien président de R.A.P., aujourd’hui salarié) me demande si je peux regarder si je trouve un moyen pour que RAP puisse auto-héberger ses pétitions en ligne vu que nous nous interdisions d’utiliser des plateformes telles que « change dot org ».
Le module WordPress utilisé à l’époque étant peu satisfaisant en termes de fonctions et d’interface.
On a regardé, et on n’a rien trouvé qui répondait à nos besoins.
J’étais chaud pour me lancer dans l’écriture d’une solution ad-hoc pour R.A.P., mais dans le doute quand même avant de commencer j’ai contacté Framasoft pour savoir s’il n’y avait pas un Framapétitions prêt à sortir. Dans ce cas j’aurai attendu un peu, mais on m’a plutôt encouragé à développer une solution pour R.A.P., quitte à ensuite la rendre plus générique pour étendre son usage au delà de la galaxie RAP.
On avait besoin d’un système de pétition « pour dans 2 mois ».
J’ai donc écrit, à la va-vite, depuis 0, un système très basique, uniquement destiné à l’usage de R.A.P., dans un langage que je connaissais bien : Python (avec le framework web Django).
Au final ça a été rapidement mis en production, et cette v1.0 héberge déjà 9 pétitions, consultables ici : https://petition.antipub.org/
Par rapport à la v1.0, on a fait beaucoup de chemin.
[...]/petitions/12
;Les plans pour le futur ?
Oui !
Une version de démonstration de la v2.0, en bêta, est disponible ici : https://pytitiondemo.sionneau.net/
C’est uniquement disponible pour jouer avec, car la base de donnée sera effacée régulièrement au gré des mises à jour. Ne pas s’en servir pour une vraie pétition ;)
Vous pouvez m’aider de plein de manières différentes :
J’ai aussi besoin d’aide pour financer le développement du projet, vous pouvez faire des dons ici :
Je suis ravi qu’on puisse tisser des liens entre le monde de l’anti-pub et celui du logiciel libre. Deux mondes a priori distincts mais qui en réalité s’entrecroisent de bien des manières.
Dans un deuxième temps, je profite de cet espace de parole qui m’est laissé pour passer un petit coup de gueule.
Je voudrais pointer du doigt ce qui m’apparaît comme une montée en puissance de la répression vis à vis des mouvements sociaux en général et du monde associatif en particulier. On voit de plus en plus d’associations comme Attac, ANV/Alternatiba ou RAP dernièrement (mais aussi entre autre des groupes informels féministes qui dénoncent les féminicides, le collectif Vérité pour Adama, …) qui subissent de sérieuses tentatives d’intimidation suite à leur actions. Ce genre d’actions, il n’y a pas si longtemps, ne déclenchait pas tous ces mécanismes : interpellations, contrôles d’identité, gardes à vues, souvent suivis de procédures judiciaires. Il devient très compliqué de faire avancer les sujets de société sans se trouver rapidement confronté à la police et à la justice. Je trouve ça très dommageable pour notre démocratie. Celle-ci ne s’arrête en théorie pas au simple fait de voter pour l’exécutif et le législatif mais inclut aussi la participation direct des citoyen⋅ne⋅s : dans les échanges, le plaidoyer, la mobilisation, la sensibilisation, la co-construction d’alternatives et bien d’autres modes d’actions.
Je déplore la radicalisation de l’exécutif, qui s’isole de plus en plus de l’effervescence politique du reste de la population. J’aimerais que l’exécutif s’inspire beaucoup plus de ce qu’il se passe dans la société civile plutôt que de rester dans la confrontation. Pour finir sur une note plus positive, je pense que malgré les difficultés posées par le contexte répressif, il faut continuer d’œuvrer pour construire la société dans laquelle nous souhaitons vivre.
[Note de Framasoft : pour celles et ceux que le sujet intéresse, nous reparlerons spécifiquement de ce rétrécissement de l’espace démocratique et des formes de répressions envers les associations dans quelques semaines sur le Framablog.]
Framasoft : Merci Yann d’avoir répondu à nos questions, et d’avoir développé Pytitions ! Nous encourageons les lectrices et lecteurs du Framablog à soutenir Yann, que ça soit sous forme financière pour qu’il puisse se dégager du temps, en l’aidant sur le logiciel (documentation, développement, etc.), ou tout simplement en le remerciant et en l’encourageant à poursuivre ce travail.
Rendez-vous sur la page des Carnets de Contributopia pour y découvrir d’autres articles, d’autres actions que nous avons menées grâce à vos dons. Si ce que vous venez de lire vous plaît, pensez à soutenir notre association, qui ne vit que par vos dons. Framasoft étant reconnue d’intérêt général, un don de 100 € d’un contribuable français reviendra, après déduction, à 34 €.
Illustration d’entête : CC-By David Revoy
Et si le pair-à-pair devenait le modèle et le moteur d’une nouvelle organisation sociale ? – Deuxième volet de la réflexion de Michel Bauwens (si vous avez raté le début, c’est par ici).
Source : Blueprint for P2P Society par Michel Bauwens
Traduction Framalang : Fabrice, goofy, jums, CLC, avec l’aimable contribution de Maïa Dereva.
2. Les relations entre la communauté et la coalition d’entrepreneurs
Quelles sont les relations entre cette coalition d’entrepreneurs et les communs dont ces entrepreneurs retirent leur valeur ? La coalition subvient aux besoins vitaux des « commoners » et soutient parfois financièrement l’institution à but lucratif. IBM, par exemple, verse un salaire aux développeurs/commoners qui contribuent à l’environnement Linux ainsi que des aides à l’association à but non lucratif (la Fondation Linux). Ainsi, les coalitions entrepreneuriales co-produisent et financent les biens communs sur lesquels leur succès est bâti.
Il est vrai qu’en agissant de la sorte, ils font par ailleurs de Linux un « commun d’entreprises », comme l’a expliqué Doc Searls :
Le rédacteur en chef du Linux Journal explique que « Linux est devenue une entreprise économique commune (une joint venture) composée d’un certain nombre de sociétés, tout comme Visa est une entreprise commune à un certain nombre de sociétés financières. Comme le montre le rapport de la Fondation Linux, ces sociétés participent au projet pour des raisons commerciales diverses et variées ».
Dans un rapport de la Fondation Linux sur le noyau de Linux, il est dit clairement :
Plus de 70 % des développements du noyau sont visiblement réalisés par des développeurs qui sont rémunérés pour ce travail. Plus de 14 % vient de contributions de développeurs qui sont connus pour ne pas être rémunérés et être indépendants, et 13 % sont produits par des gens qui peuvent ou non être rémunérés, donc la contribution faite par des travailleurs rémunérés peut atteindre jusqu’à 85 %. Par conséquent, le noyau Linux est largement produit par des professionnels, et non par des bénévoles.
Mais ce n’est pas là toute l’histoire. Thimothy Lee explique que la transformation de Linux en entreprise n’a pas changé son modèle d’organisation sous-jacente :
… l’important est la manière dont les projets open source sont organisés en interne. Dans un projet logiciel traditionnel, il y a un responsable projet qui décide des fonctionnalités dont bénéficiera le produit, et affecte du personnel pour travailler sur ces différentes fonctionnalités. En revanche, personne ne dirige le développement général du noyau Linux. Oui, Linus Torvalds et ses lieutenants décident quels correctifs iront finalement dans le noyau, mais les employés de Red Hat, IBM et Novell qui travaillent sur le noyau Linux ne reçoivent pas d’ordre de leur part. Ils travaillent sur ce qu’ils (et leurs clients respectifs) pensent être le plus important, et la seule autorité que possède Torvalds est celle de décider si le correctif qu’ils soumettent est suffisamment bon pour être intégré au noyau.
Clay Shirky, auteur de « Here Comes Everybody : The Power of Organizing Without Organisations [NdT : Voici venir tout le monde: le pouvoir de s’organiser sans les organisations] souligne que les entreprises qui travaillent avec Linux, comme IBM, « ont abandonné le droit de gérer les projets pour lesquels ils payent, et que leurs concurrents ont accès immédiatement à tout ce qu’ils font. Ce n’est pas un produit IBM. »
C’est donc là où je veux en venir : même avec des sociétés d’actionnaires alliées à la production entre pairs, la création de valeur de la communauté reste toujours au cœur du processus, et la coalition entrepreneuriale, jusqu’à un certain point, suit déjà cette nouvelle logique, dans laquelle la communauté prime, et où le business est secondaire. Dans ce modèle, la logique d’entreprise doit s’accommoder de la logique sociale. En d’autres termes, c’est avant tout une « économie éthique ».
3. La logique démocratique des institutions à but lucratifLa production entre pairs repose aussi sur une infrastructure de coopération parfois coûteuse. Wikipédia n’existerait pas sans le financement de ses serveurs, pas non plus de logiciel libre ou de matériel ouvert sans mécanisme de support similaire. C’est pour cela que les communautés open source ont créé une nouvelle institution sociale : les associations à but lucratif.
Encore une fois, c’est une innovation sociale importante car, contrairement aux institutions à but non-lucratif ou non-gouvernementales, elles ne fonctionnent pas du point de vue de la rareté. Les ONG classiques fonctionnent encore comme d’autres institutions industrielles à l’instar de l’entreprise ou de l’état-marché, car elles estiment que les ressources doivent être mobilisées et gérées.
À l’inverse, celles qui ont un but lucratif ont uniquement un rôle actif qui permet et favorise la coopération au sein de la communauté, qui fournit les infrastructures, sans pour en diriger les processus de production. Ces associations existent dans le seul but de bénéficier à la communauté dont elles sont l’expression, et c’est la bonne nouvelle, elles sont souvent gérées de manière démocratique. Et elles doivent l’être, car une institution non démocratique découragerait les contributions de sa communauté de participants.
Maintenant, le hic est de savoir comment appeler une institution responsable du bien commun de tous les participants, en l’occurrence, pas les habitants d’un territoire, mais les personnes impliqués dans un projet similaire ? Je rétorquerais que ce type d’institution à but lucratif possède une fonction très similaire aux fonctions normalement dévolues à l’État.
Bien que la forme étatique soit toujours aussi une institution de classe qui défend un arrangement particulier de privilèges sociaux, elle ne peut jamais être un simple instrument de règle de privilégié à elle seule, mais doit aussi gérer le commun. Si l’on considère cette dernière option, la plupart des gens la verrait comme acceptable, voire bonne. En revanche, si l’on considère que l’État échoue dans cette gestion, alors il perd sa légitimité et il est vu de plus en plus comme une source d’oppression par une minorité.
En général, un État reflète l’équilibre des forces à l’œuvre dans une société donnée. L’État providence était une forme acceptable puisqu’il reposait sur un compromis et sur la force d’un puissant mouvement de travailleurs ouvriers, alors que « la peur de Dieu » était instillée dans les milieux privilégiés par la possibilité d’un modèle alternatif d’État qui aurait pu faire disparaître la loyauté de leurs citoyens.
Cette alternative s’est effondrée en 1989, et avec elle les mouvements sociaux occidentaux. Elle a d’autant plus été affaiblie par les choix sociaux, politiques et économiques de désindustrialiser le Nord depuis les années 1980. Depuis, l’État providence a peu à peu laissé sa place à l’État providence contemporain des multinationales (parfois appelé « l’État marché »), qui aide uniquement les privilégiés, détruit les mécanismes de solidarité sociaux, et appauvrit la majorité de la population, et a fortiori affaiblit fatalement la classe moyenne.
Malheureusement, un tel système ne peut avoir aucune une légitimité à long terme, et rompt tout contrat social qui peut garantir la paix sociale. Il est compliqué d’établir une loyauté sur la perspective d’une souffrance toujours plus grande !
Cela signifie que nous assistons non seulement à la mort réelle de l’État providence social, mais aussi à la mort et à l’impossibilité logique de l’État-marché. Nous pourrions ajouter que même l’État providence est devenu problématique. La raison principale en est que sa base sociale, la classe ouvrière occidentale et ses mouvements sociaux, sont devenues des minorités démographiques en Occident, et que ses mécanismes, même lorsqu’ils fonctionnaient, ne contribueraient pas beaucoup à aider la majorité sociale actuelle, c’est-à-dire les travailleurs de la connaissance et des services, souvent indépendants et précaires.
De plus, le fonctionnement paternaliste et bureaucratique de beaucoup d’États providence devient inacceptable face à la demande émergente d’autonomie sociale et personnelle qui est l’un des principaux désirs sociaux de la nouvelle classe des travailleurs de la connaissance. La plupart des autres fonctions sociales de l’État providence ont été affaiblies par les réformes néolibérales du « New Labour » qui tendent à introduire la logique du secteur privé dans le monde du secteur public.
Comme chaque lundi, un coup d’œil dans le rétroviseur pour découvrir les informations que vous avez peut-être ratées la semaine dernière.
Tout le monde ne l’a pas installée pour s’amuser. En septembre, 10 000 journalistes et rédacteurs en chef travaillant pour quatorze organes de presse officielle à Pékin ont appris qu’ils devraient se soumettre à une série de « tests de loyauté » à partir du mois d’octobre pour pouvoir conserver leur carte de presse. Les examens en ligne se feront à partir de cette application Xuexi Qiangguo, et pourraient être étendus ensuite à l’ensemble du pays. Avec ce mouchard, c’est donc potentiellement à toute l’activité des journalistes des médias d’Etat (télé, radio, journaux, agence de presse…) que le Parti communiste a accès. Et, depuis quelques mois, à celle de tous les chercheurs ou journalistes étrangers qui l’avaient installée par curiosité.
Autre indice ayant mis la puce à l’oreille aux experts, les coordonnées par défaut de l’application iLoud200 % – soi-disant utilisée pour augmenter le volume sonore d’un téléphone, indiquait finalement la géolocalisation du téléphone – qui correspondaient tout bonnement au Service général des renseignements du pays.
Depuis le début du mois d’octobre, un ample mouvement social secoue l’Équateur suite au retrait, par le gouvernement de l’actuel président Lenin Moreno, de subventions permettant de stabiliser le prix de l’essence, provoquant une forte inflation. Le mouvement s’est vite transformé en la plus grande révolte que le pays a connu ces dernières années. Des indiens venus de toutes les régions du pays ont investi la capitale, Quito, et ont occupé le Parlement. Le gouvernement a décrété l’État d’urgence et a quitté la capitale, se réfugiant à Guayaquil, sur la côte, où il siège actuellement. En réponse, la Confédération des Nationalités Indiennes de l’Équateur (CONAIE) a décrété à son tour l’État d’urgence sur les territoires indiens, annonçant que tout représentant de l’État qui y pénétrerait serait arrêté. Jusqu’à aujourd’hui, la répression du mouvement par l’armée et la police a déjà fait près de 554 blessés, 929 prisonniers et 5 morts.
L’application Tsunami Democràtic fait sienne la devise « be water » du soulèvement de Hong Kong et s’appuie sur l’application Sukey des manifestations étudiantes de 2011 au Royaume-Uni : elle ne peut être activée qu’en scannant le QR code d’un membre existant, et une fois activée, elle vous place dans une « cellule » avec des utilisateurs proches et vous montre des actions qui ont lieu à proximité, mesures visant à coordonner les manifestations et à limiter le risque d’exposition lorsque la police s’en empare.
L’application est une application Android sideloadée et il n’y a pas de version iOS, ce qui signifie qu’il n’y a aucun moyen pour Google ou Apple de supprimer l’application de leurs stores sous pression de Madrid.
Si le PKK, mouvement marxiste-léniniste fondé en 1978, fait sans conteste figure d’adversaire de l’État turc, il s’agit aussi de l’un des mouvements les plus féministes de tout le Moyen-Orient.
L’organisation politique a tenu son premier congrès sur les droits des femmes en 1987.[…] Aujourd’hui, l’une des priorités politiques du parti consiste en la reconnaissance expresse de la place essentielle des minorités religieuses, des dissidents et des femmes au sein de la vie démocratique.
[…] Les femmes représentent 30 % des combattants kurdes déployés au Moyen-Orient. Plus de 25 000 Kurdes sont par ailleurs mobilisées en Syrie au sein des Unités de protection des femmes, brigades exclusivement féminines reflétant les principes d’émancipation des femmes du PKK. À titre de comparaison, l’armée américaine ne compte que 14 % de femmes dans ses rangs.
Ce sont des troupes kurdes féminines qui ont sauvé des milliers de Yazidis pris au piège par Daech sur le mont Sinjar en Irak en 2014, et ont participé à la libération de la ville de Raqqa du joug de l’organisation terroriste en 2017.
Jean-Paul Delahaye alerte sur les coupes budgétaires drastiques prévues par le gouvernement, notamment dans les crédits destinés aux collégiens et lycéens de familles pauvres.
Le terme surtout employé par la SNCF et le gouvernement a été repris dans plusieurs médias pour évoquer les perturbations en cours sur le trafic ferroviaire. Ce débat sémantique est loin d’être anodin.
Pour tous les usagers du train, ce conducteur n’est rien d’autre qu’un héros qui a sauvé 70 vies : en effet, d’autres trains arrivant sur la voie auraient pu causer un « sur-accident », si le cheminot n’était pas parvenu à mettre en place la procédure d’urgence assez rapidement. La question que tout le monde devrait se poser est la suivante : et si l’accident avait été plus grave pour le conducteur ? Si au lieu d’une blessure à la jambe le conducteur avait été dans l’incapacité de se déplacer ? Si celui-ci était même mort dans l’accident ? Aurait-on dû, pour économiser un poste de contrôleur dans le TER, mettre en danger tous les passagers du train ? Les images du TER, dont l’avant a été déchiqueté par l’impact au point de mettre hors-service la radio, montrent que de telles hypothèses sont loin d’être fantasques !
Les représentants du ministère du Travail suggèrent la plus grande prudence à la direction de l’entreprise désireuse de prendre des mesures disciplinaires à l’égard des conducteurs de train qui ont exercé leur droit de retrait
« L’entrave au droit de retrait est un délit punissable d’une amende de 10 000 euros multipliée par le nombre de salariés concernés. »
« La manifestation se déroulait dans le calme. Il était environ 17h30 et nous étions sur la place de la Nation. Nous attendions les bus pour rentrer à Dijon, tout le monde était fatigué. Et puis d’un coup, ça s’est excité devant. On a subi un flot de grenades lacrymogènes. Mon collègue était à côté de moi, il a levé la tête et il a pris un éclat de grenade sur le casque. Il est tombé à terre tout de suite, on l’a soutenu et on a appelé les collègues pompiers de Paris. C’était la panique totale. »
[…] « Après, les collègues se sont un peu énervés. Mais à la base, on ne faisait rien, on attendait pour repartir. Aujourd’hui, nous en voulons aux personnes qui ont donné l’ordre de faire ça. »
Le 12 janvier 2019, à Bordeaux, après une charge de la police, le manifestant « gilet jaune » Olivier Beziade est gravement blessé à la tête. Plongé dans le coma artificiel par les pompiers, puis immobilisé par 90 jours d’ITT, il souffre toujours d’hémiplégie. […] l’enquête vidéo du Monde révèle comment ce manifestant a été la cible d’un tir de LBD 40 dans la tête alors qu’il ne présentait pas de menace, mais aussi d’un jet de grenade de désencerclement non autorisé. Des images qui illustrent comment les forces de l’ordre ont fait usage d’armes dangereuses sans respecter les principes de nécessité et de proportionnalité, ni les règles en matière d’assistance et de premiers secours.
Oui, la crise frappera tout le monde. Mais il y a des façons massivement injustes de faire du tort à certaines personnes plus qu’à d’autres. Et quand nous effaçons cela, quand nous ignorons les voix de celles et ceux qui sont en première ligne et qui sont le plus en jeu, quand nous nous concentrons uniquement sur « nos enfants » et non sur les gens qui meurent maintenant, nous risquons de laisser la place à l’éco-fascisme. En refusant de nommer les causes de la crise climatique et des autres injustices sociales – le colonialisme et le capitalisme – XR continuera à aliéner les gens qui vivent déjà à l’extrémité du système qui finira par tou·te·s nous tuer.
Après avoir été interrogé sur la question de savoir si les propriétaires devraient dire à leurs invités que des dispositifs intelligents – comme un haut-parleur Google Nest ou un écran Amazon Echo – sont utilisés avant qu’ils n’entrent dans le bâtiment, il conclut que la réponse est effectivement « oui ».
La semaine passée, Reclaim the Net, un site Web de cybersécurité, a déclenché une vague de réactions sur la toile après avoir publié un rapport indiquant qu’Apple partage les adresses IP des utilisateurs d’iOS localisés en Chine avec Tencent Holdings. D’après la rumeur, Tencent serait lié au gouvernement communiste chinois et ne recevrait pas que les adresses IP, mais également d’autres informations de navigation. Apple a réagi à cette rumeur cette semaine en déclarant que l’entreprise ne transmettait pas les URL de Safari à Tencent, mais uniquement les adresses IP.
Dans les systèmes hiérarchiques, ce sont nos supérieurs qui décident ; sur les marchés, ce sont les prix ; dans les démocraties, c’est « nous » qui sommes les décideurs. Mais lorsque les ressources sont illimitées, comme c’est le cas pour ce qui est de la connaissance, du code ou du design, ce n’est plus véritablement utile, puisque connaissance, code ou design peuvent être copiés et partagés à un coût marginal.
Ces communautés sont de véritables « poly-archies » où le pouvoir est de type méritocratique, distribué et ad hoc. Chacun peut contribuer librement, sans avoir à demander l’autorisation de le faire, mais cette liberté de contribution a priori est contrebalancée par des mécanismes de validation communautaires a posteriori : la validation émane de ceux dont l’expertise est reconnue et qui sont acceptés par la communauté, ceux que l’on appelle les « mainteneurs » ou encore les « éditeurs ».
La « légalité non souhaitable » c’est lorsque tu expliques que « bien sûr c’est légal » (de se promener, de faire des sorties scolaires ou de courir – non pas de courir apparemment – avec un Hidjab) mais que « bien sûr ce n’est pas souhaitable » (que des femmes courent, fassent des sorties scolaires ou se promènent dans l’espace public avec un Hidjab).
[Rien à voir mais ça me démange] Entre ces deux-là et le troisième endimanché stratosphérique qui sur un tout autre sujet nous explique qu’il est, je cite, « nécessaire d’expérimenter la reconnaissance faciale pour que nos industriels progressent », l’impression que la réalité est soluble dans un reportage de Groland devient assez troublante et pénible sur le long terme. J’en profite quand même pour rappeler à Cédric O, nouveau lauréat du prix Nobel du raisonnement à la con, que l’expérimentation du Zyklon B a également permis à l’industrie de progresser. [Rien à voir mais ça me démangeait]
Croyez les femmes quand nous disons que le bureau est trop froid, quand nous disons que nous sommes moins payées et surtout quand nous disons que nous souffrons.
Le scepticisme sur ce dernier point coûte des vies : selon une étude menée par l’Université d’Édimbourg et financée par la British Heart Foundation, les femmes qui se sont rendues aux urgences après avoir souffert de douleurs thoraciques (on a découvert plus tard qu’elles faisaient une crise cardiaque) étaient moitié moins susceptibles que les hommes de recevoir le traitement médical recommandé. La recherche vient après qu’il a été révélé que l’entrée de symptômes cardiaques identiques pour les femmes et les hommes sur Babylon, une application virtuelle louée par le secrétaire de la santé, Matt Hancock, a abouti à différents diagnostics. L’intelligence artificielle indique à une fumeuse de 60 ans qui signale des douleurs thoraciques et des nausées qu’elle fait simplement une crise de panique. Un fumeur de 60 ans qui présente exactement les mêmes symptômes se fait dire qu’il pourrait faire une crise cardiaque et on lui conseille de se rendre aux urgences.
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